Clairière de l’Armistice de Rethondes, en forêt de Compiègne. C’est là que démarreront les festivités du centenaire de la fin de la Grande Guerre, avec, en point d’orgue, une cérémonie à laquelle assisteront Emmanuel Macron et Angela Merkel, dans l’après-midi du 10 novembre. Car l’Oise et son histoire sont évidemment liées à la première guerre mondiale. Pour comprendre les enjeux de cette guerre, se souvenir, transmettre, visite mémorielle de Compiègne et sa région. Le wagon de l’Armistice
Commencer par le Mémorial de l’Armistice est le meilleur moyen pour s’immerger dans ce passé. Auparavant vieillot et poussiéreux, l’endroit, à la faveur des cérémonies du centenaire, a bénéficié d’une rénovation et d’une nouvelle scénographie, ainsi que d’une extension de plus de 500 m2 de la surface d’exposition. Le célèbre wagon – du moins un wagon identique, l’original ayant été détruit – dans lequel fut signé l’armistice, est toujours là. Mais pour le reste, Bruno Badiche, le scénographe, a opté pour une présentation chronologique évoquant notamment les temps forts du conflit. Une visite en une dizaine d’étapes qui fait la part belle à la 3D : celle d’époque avec les photos sur plaque de verre selon le vieux procédé steréoscopique qui donne un effet de relief saisissant – une technique qui consistait à prendre une photo avec un appareil à deux objectifs recréant ainsi les conditions du relief –, et celle d’aujourd’hui, générée par ordinateur, dans une nouvelle salle de projection. Au sortir du musée, faire un tour dans la clairière à la découverte d’émouvants monuments, dont cette dalle sacrée sur laquelle on peut lire, gravé dans le même granit de Vire que la tombe du Soldat inconnu de l’Arc de triomphe : « Ici le 11 novembre succomba le criminel orgueil de l’empire Allemand vaincu par les peuples libres qu’il comptait asservir ».
Le Mémorial de l’Armistice : route de Soissons, 60200 Compiègne. Tél. : 03-44-85-14-18. Musee-armistice-14-18.fr
La vie des poilus
A quelques minutes en voiture de la clairière de l’Armistice se trouve le point d’entrée du Musée Territoire 14-18. Une notion un peu floue pour une réalisation bien concrète : ce musée est, en fait, une balade à ciel ouvert sur une soixantaine de kilomètres. En une vingtaine de sites, on appréhende mieux la vie des villages, des poilus, où se mêlent souvent l’Histoire avec un grand H et celle du quotidien, faite de souffrance et d’absence. Il y a pourtant un point de départ incontournable pour toutes ces balades : l’exposition très didactique et très complète qui se trouve dans l’ancien presbytère de l’église de Rethondes. Une église qui se visite également pour ses vitraux, et dont les cloches ont été les premières à sonner l’Armistice. L’anecdote veut que la vigueur avec laquelle les cloches ont été sonnées aurait provoqué d’importantes fêlures…
Le Musée Territoire 14-18 : 19, rue de Verdun, 60153 Rethondes. Tél. : 03-44-90-14-18. Musee-territoire-1418.fr
Un bunker de 32 mètres
L’abri du Kronprinz, à Nampcel, est l’un des vestiges les plus imposants de la Grande Guerre. Ce bunker, classé à l’inventaire des monuments historiques depuis 1999, tire son nom du Kronprinz de Bavière, qui y aurait, dit-on, séjourné à l’été 1918. Edifiée entre 1915 et 1916 avec les pierres des maisons détruites de Nampcel, la casemate de 32,8 mètres de long, 10 mètres de large et 6 mètres de haut servait à se protéger des tirs de l’artillerie française. Les Allemands l’occupèrent jusqu’en mars 1917 avant de l’abandonner et de le rependre quatorze mois plus tard… Il est aujourd’hui restauré et mis en valeur par une association, l’Association pour la rénovation de l’abri du Kronprinz. Plusieurs des circuits de randonnée faisant partie du circuit Musée Territoire 14-18 passent par ce lieu.
L’abri du Kronprinz : Chemin du Bois de Fay, 60400 Nampcel. Tél. : 03-44-42-81-44.
Les petits soldats de Compiègne
A proximité de Rethondes, il y a évidemment Compiègne et la sous-préfecture de l’Oise ne manque pas de témoignages autour de la Grande Guerre. Deux endroits ont su nous séduire : le Musée de la figurine historique, d’abord, réussit la prouesse de réunir la Grande Guerre et les petits soldats, qu’ils soient en étain, en plomb, en bois ou même en papier… Pas moins de 155 000 figurines retracent l’histoire, de l’Antiquité à la seconde guerre mondiale. Les poilus font l’objet de deux compositions réalisées par l’abbé Robert Ducoin dans les années 1970 sur « Août 1914 » et « Mars 1918 ». La première montre en détail une batterie de 75 au complet, soit 173 hommes et 168 chevaux. La seconde, nous transporte sur le front de 1918 avec les chars d’assaut, l’arrivée des troupes sénégalaises, la conduite des trains d’équipage et la construction des boyaux et des tranchées. Des petits soldats, comme ceux avec lesquels ont joué tous les enfants du monde, qui racontent l’histoire et témoignent du quotidien des poilus avec un réalisme surprenant.
Le Palais, initialement demeure des rois Louis XV et Louis XVI, puis celle des empereurs Napoléon Ier et Napoléon III, a été transformé en hôpital de l’automne 1914 au printemps 1917, une dimension humanitaire qui préservera l’édifice. L’armée française y installera même son quartier général jusqu’en juin 1918. Aujourd’hui, la salle des gardes du roi, dans laquelle était installé l’hôpital, a retrouvé son lustre… Elle se visite, comme les appartements de l’Empereur et de l’impératrice, le Musée du Second Empire, celui de la voiture (de l’attelage à la voiture moderne), ainsi que le très beau parc qui voisine la forêt.
Le Musée de la figurine historique : 28, place de l’Hôtel-de-Ville, 60200 Compiègne, Tél. : 03-44-40-72-55. www.musee-figurine.fr
Le Palais : place du Général-de-Gaulle, 60200 Compiègne. Palaisdecompiegne.fr
Les murs ont de la mémoire
C’est un musée unique en son genre que l’on doit à Serge Ramond, habitant de Verneuil-en-Halatte. L’homme, aujourd’hui décédé, s’est passionné pendant quarante ans pour les graffitis historiques ; l’ancien Musée des graffitis historiques est aujourd’hui devenu celui de la « mémoire des murs ». Ici, plus de dix mille ans de témoignages gravés, du néolithique au XXe siècle, sont mis en valeur. N’allez pas imaginer que Serge Ramond découpait des bouts de mur ! Il utilisait une méthode très simple : une prise d’empreinte effectuée avec de la plastiline, sorte de pâte à modeler appliquée sur le motif à reproduire. De cette empreinte est tirée un moulage en plâtre, qui reçoit une patine restituant l’aspect de la pierre et révèle le dessin ou le texte gravé. C’est à l’étage, dans l’un des combles du musée, que se trouve une exceptionnelle collection de plusieurs centaines de moulages de graffitis gravés et sculptés par tous les soldats qui ont cantonné dans les carrières, en Picardie, lors du premier conflit mondial. Français, Anglais, Américains et Allemands ont ainsi contribué à illustrer ce
Lascaux moderne. Pas de bisons ici, mais un navire baptisé Liberté en train de couler, œuvre d’un poilu du 218e régiment, entouré d’une phrase, « Septembre 1917, la liberté quittant le monde… », ou cette tête de chef sioux, avec sa coiffe, attribuée à un soldat américain.
Le Musée de la mémoire des murs : place de Piegaro, 60550 Verneuil-en-Halatte
Tél. : 03-44-24-54-81. Memoiredesmurs.com
A la carrière de la Botte, la guerre souterraine
En nous attendant, Yohan Levaire, membre de l’association Les Souterrains 14-18 de la Carmoye, a glané dans le champ d’en face quelques morceaux d’obus, la terre rendant toujours ce qu’elle a absorbé… Situés sur les hauteurs de Cannectancourt, au nord-est de l’Oise, dans le massif dit de « la Petite Suisse », près de la ferme de la Carmoye, les souterrains de la carrière de la Botte constituent un lieu unique dans le département. « L’exemple même de la guerre souterraine », explique Yohan en nous menant à l’entrée de la carrière après une courte marche dans un bois peu touffu où la nature a quand même sur cette longue période repris ses droits. « C’est ici, nous dit-il, que les Allemands se sont enterrés, à plus de dix mètres sous terre parfois plus, de 1914 à 1917. » En mars 1917, la carrière est reprise par l’armée française. Aujourd’hui, la visite à la lueur d’une lampe reste un moment d’une rare émotion, tant les témoignages qui y subsistent, dessins, objets et autres inscriptions vous transportent un siècle en arrière…
La carrière de la Botte : Musee-territoire-1418.fr/Decouvrir-les-sites/Les-carrieres/Carriere-de-la-Botte
Carnet de route
Notre journaliste a organisé son voyage avec l’aide de Oise Tourisme.
Y aller
Au départ de Paris, pour aller à Compiègne en train ou en voiture par l’autoroute A1, compter 50 minutes.
Se loger
La Villa du Chatelet. Située à Choisy-au-Bac, à 5 minutes de Compiègne, dans un vaste parc, adossé à la forêt de Laigue, la Villa du Chatelet a été construite en 1886 pour le célèbre compositeur Léo Delibes. Les trois chambres portent les noms de trois de ses opéras : Lakmé, Coppélia et Kassya. A partir de 120 euros la nuit pour deux personnes, petit déjeuner compris. Tél. : 06-62-43-12-95. Villaduchatelet.com
La Parenthèse du Rond Royal. Trois charmantes chambres d’hôtes à proximité du centre-ville de Compiègne. A partir de 105 euros la chambre double, petit déjeuner inclus. Tél. : 06-29-49-32-97. Laparenthesedurondroyal.com
Déjeuner, dîner
Les chefs de neuf restaurants de l’Oise ont travaillé avec l’historien Jean-Yves Bonnard sur un « Menu 14-18 » inspiré des habitudes culinaires de l’époque, qui sera servi jusqu’à la fin de l’année. Nous en avons sélectionné deux : Les Accordailles, à Compiègne, qui propose un menu à 27 euros entrée, plat, dessert (Velouté des tranchées, Secret de la victoire et Marguerite au fusil). 24, rue d’Ulm, Tél. : 03-44-40-03-45. Et l’Auberge du Mont-Saint-Pierre, à Vieux Moulin, qui propose le Colis de famille, la Boîte de singe et la Signature du wagon de l’Armistice pour 33 euros. 27, rue des Etangs, Tél. : 03-44-85-60-00. Liste complète avec explication des plats sur Oisetourisme.com/les-menus-14-18.